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Introduction à l’archéologie du genre Photo

Introduction à l’archéologie du genre

La femme préhistorique était-elle une docile femme au foyer ? Toutes les tombes féminines finement ornées appartiennent-elles à des prêtresses ou des favorites ?
À l’occasion de la sortie du livre L’homme préhistorique est aussi une femme (2020, éd. Allary Eds) de Marylène Patou-Mathis, il faut s’interroger sur la place de plus en plus importante de l’archéologie du genre.
Longtemps utilisée comme argument d’autorité avec des phrases comme « c’est comme ça depuis la Préhistoire » et autres instincts maternels ; l’archéologie connait une évolution depuis les cinquante dernières années.
De nouvelles générations de chercheuses remettent en question la construction culturelle du genre et l’invisibilisation des femmes dans l’Histoire.
Une occasion de proposer une rapide introduction à la peu connue, mais si nécessaire archéologie du genre.

Définition

L’archéologie du genre s’inscrit dans les decolonial & gender studies qui se sont développées à partir de la fin des années 70. Cette branche de l’archéologie s’est d’abord développée dans le monde anglophone, au contact de nombreuses luttes initiées durant cette décennie, telles que le féminisme, les luttes pour les droits lbtqi+ ou les mouvements décoloniaux.

Quand on parle d’archéologie du genre, on étudie un panel de catégories et leurs interactions entre elles, tel que le statut social, les pratiques culturelles ou l’orientation sexuelle ; afin de dépasser le déterminisme biologique comme élément prédominant de caractérisation des individus. Son but est d’ouvrir la discipline à la compréhension des pratiques sociales et culturelles dans les sociétés, sans préjugés de sexes, d’orientation sexuelle ou de genre.
Cette branche d’étude participe à la déconstruction de l’archéologie comme discipline hermétique dans laquelle l’homme blanc hétérosexuel reste la norme et biaise les interprétations, écartant tout autre groupe.
Ainsi, l’archéologie du genre interprète le genre comme une construction sociale, un processus relationnel et de pouvoir. Ses deux principales vocations sont d’interpréter les rapports culturels et sociaux entre les sexes et de dépasser la question du déterminisme biologique comme catégorie d’analyse. C’est-à-dire affirmer que le genre n’est en rien lié au sexe biologique, mais dépend d’une construction sociale et culturelle qui varie selon les époques et les lieux.

La construction androcentriste de la pratique de l’archéologie

L’archéologie du genre s’est développée en réaction à la pratique classique de l’archéologie.
Pour rappel, l’archéologie est l’étude de l’histoire humaine passée grâce à des méthodes de recherche, d’analyses et d’interprétation, portant sur des objets. C’est une discipline théorique et pratique avec ses codes, ses méthodes et ses spécialisations. Si l’étude d’objets anciens remonte à l’antiquité, la discipline scientifique s’est développée au XIXe siècle.
L’archéologie a donc la difficile tâche de faire parler le passé grâce à des vestiges de la production humaine. Pour cela il faut définir et interpréter des artefacts pour comprendre les pratiques culturelles d’une population. Or l’étape de l’interprétation est la plus sensible car elle est directement liée au prisme culturel de la personne qui interprète.
Cette discipline ayant d’abord été créée par des hommes pour des hommes, elle a été réservée professionnellement aux élites masculines européennes. Il est évident que ces derniers ont transposé leurs prismes culturels contemporains sur leurs recherches et leurs découvertes.
Ainsi, longtemps les objets trouvés en fouilles ont été genrés selon des aprioris culturels. La présence d’une arme dans une tombe a souvent suffi pour la catégoriser comme tombe masculine et la présence d’un bijou à en faire une tombe féminine.
L’archéologie a donc partiellement reposé sur des stéréotypes de genre appliqués à des objets et des pratiques, limitant les possibilités d’interprétation.
Le regard porté sur les découvertes ainsi biaisé, les femmes n’ont trouvé que peu de place dans la discipline.
Quant aux femmes étudiées, quand elles n’étaient pas invisibilisées, on les imaginait -peu importe l’époque et le lieu- en silencieuses mères au foyer, n’ayant pas marqué l’Histoire. Les archéologues avaient alors déterminé que le rôle naturel d’une femme était la maternité et qu’elle ne pouvait donc se dévouer qu’à ce rôle domestique. En plus de simplifier énormément la place de la femme dans la société, cette conception nie toute autre possibilité de genre hors du cadre binaire.

La prise de conscience tardive de l’archéologie

Comme toute science humaine, l’archéologie a été influencée par les mouvements sociaux successifs. Ainsi, les changements sociaux et politiques de la situation des femmes en occident ont modifié le regard porté sur les civilisations étudiées. Les femmes archéologues étant sous-représentées dans les cercles de recherches, l’archéologie du genre est d’abord militante.

Margaret W. Conkey et Janet D. Spector sont les pionnières de l’archéologie du genre dans le monde anglophone. Conkey est une archéologue préhistorienne, remettant notamment en cause l’idée que les peintures des parois de grottes ne seraient que des productions masculines.
Dans les années 80, elles appliquent des méthodes de pensée et des théories féministes à la recherche archéologique. Elles rédigent l’article « Archaeology and the Study of Gender » qui intègre l’idée que le genre est une construction sociale propre à un regard androcentré et appellent à replacer les femmes en tant qu’actrices de l’Histoire.
Avant elles, dans les années 70, l’archéologue norvégienne Liv Helga Dommasnes avait étudié les rapports entre les sexes dans la pratique même de l’archéologie et dans les sociétés préhistoriques.
Le développement de ces recherches dans les pays du nord de l’Europe a abouti à un premier workshop intitulé « Were they all men ? », initiant et généralisant la discipline.

D’abord militante, l’archéologie du genre devient alors une discipline en enseignement et en recherche universitaire. En 2009, Dr Margaret W. Conkey est devenue présidente de la Society for American Archaeology, montrant l’importance de ses recherches dans les sciences humaines modernes.
Aujourd’hui encore le féminisme n’est pas accepté universellement en archéologie et certains professionnels choisissent d’ignorer volontairement l’archéologie du genre.
Les nouvelles générations d’archéologues, plus paritaires, offrent de plus en plus d’espace à son enseignement et à la recherche, notamment avec des fonds dédiés, des centres de recherche spécialisés et des réseaux de contact et de communication toujours plus performants.
Ainsi, les archéologues travaillent conjointement avec des historiens, des linguistes, des anthropologues, etc., afin de réinterpréter certaines données et d’en offrir un résultat plus juste, se détachant au maximum des aprioris culturels.

Qu’est-ce que ça change dans notre compréhension du passé ?

Longtemps, l’archéologie a scindé les individus en deux genres distincts, en se basant sur leur appartenance sexuelle. Genrer un objet ou un squelette relève de notre conception culturelle occidentale. Or, ce modèle n’est pas absolu, surtout quand des archéologiques occidentaux étudient d’autres cultures ou des époques très reculées, donc peu documentées.

L’archéologie du genre opère en tant qu’outil de déconstruction des codes établis, afin de rétablir la place de la femme dans le passé. Mais aussi, de développer de nouvelles interprétations de genres, hors des stéréotypes binaires occidentaux.
Un des exemples les plus parlants est la place attribuée à la femme préhistorique. Longtemps fantasmée en objet sexuel passif, ne s’aventurant pas hors de sa grotte au risque d’être enlevée.
Les recherches en préhistoire ont commencé au XIXe siècle en occident, expliquant les forts clichés qui en découlent, souvent sans fondement archéologique.
Grâce à l’étude de lésions osseuses similaires sur des squelettes des deux sexes, il a été possible de déterminer que les femmes pratiquaient les mêmes activités que les hommes (chasse, pêche, cueillette) ; il a aussi été étudié qu’elles avaient une influence égale dans le groupe. Plus important encore, c’est cette égalité qui a permis la survivance des chasseurs-cueilleurs.
La présence en Europe de statuettes préhistoriques exclusivement féminines dénote un système de croyances autour de la figure de la femme et possiblement de groupes se formant autour du lignage maternel : le matrilignage.
À noter que de plus en plus de sociétés anciennes se révèlent être matriarcales et n’avaient pas été imaginées comme telles avant que des archéologues féminines s’y intéressent.

Aujourd’hui l’archéologie du genre change les regards portés sur toutes les époques et cultures. Ainsi, une tombe féminine richement ornée d’Amérique précolombienne n’est pas forcément synonyme de prêtresse, mais parfois d’une femme diplomatique très influente. La pirate la plus redoutable des océans était Ching Shih, une ancienne prostituée à la flotte plus puissante que certaines armées. Des tombes de femmes vikings -longtemps attribuées à des hommes- contiennent des chevaux, des armes et toutes sortes d’artefacts de guerre, dénotant ainsi qu’elles étaient des guerrières tout aussi craintes et puissantes que leurs homologues masculins.
Les sciences humaines dépassent ainsi les clichés d’une Grande Histoire masculine, dans l’ombre de laquelle les femmes auraient peiné à exister.

En plus de rendre leur important aux femmes dans l’Histoire, l’archéologie du genre tend à mettre fin à la confusion persistante entre genre, sexualité et sexe, afin de ne plus baser la compréhension d’une tombe sur un simple objet.
Par bien des exemples, notamment en archéologie funéraire, il a été prouvé que le genre n’était pas aussi important que dans notre société contemporaine occidentale. Aussi, la distinction entre les individus pouvait se faire par bien d’autres moyens que leur simple appartenance sexuelle, le sexe étant parfois un marqueur social de second plan. En dépassant cette opposition homme/femme, l’archéologie du genre déconstruit ainsi tous les clichés qui en découlent.
Cette discipline tend donc à dépasser les catégories « homme » et « femme » comme enjeux d’analyse, ces catégories étant avant tout culturelles.

Conclusion

Ainsi, l’archéologie du genre tend à critiquer le regard biaisé masculin qui a plané sur l’archéologie et plus généralement dans le monde académique, qui a développé un vocabulaire et des aprioris en faveur de l’homme blanc.

En replaçant les femmes dans l’Histoire et dans la pratique des sciences sociales, c’est une remise en question de tout le modèle d’interprétation qui en découle.
Aussi, l’archéologie du genre apporte un regard neuf au genre en tant que construction sociale et remet en perspective les interactions sociales et culturelles sans y calquer un mode de pensée prédéfini.
Portée par le militantisme et l’égalité sociale, cette discipline renouvelle les perspectives de recherches, portées par de nouvelles générations de chercheuses. Et comme dirait Marylène Patou-Mathis : « si on ne cherche pas, on ne voit pas ».

Pour aller plus loin : conseils de lecture
Je vous propose un petit panel de lectures afin de découvrir et d’approfondir les questions de genre et de féminisme en archéologie. Et, petit plus : la bibliographie est 100% féminine !

Le super Guide de survie en milieu sexiste, du collectif CEMEA, disponible en ligne et accessible aux plus néophytes !

Marylène Patou-Mathis, L’homme préhistorique est aussi une femme, éditions Allary, 2020

Deux livres de Claudine Cohen, La femme des origines (réédité en 2020) et Femmes de la préhistoire (2016), éditions Belin

Joan Gero, Margaret W. Conkey (dir.). Engendering Archaeology: Women and Prehistory, Blackwell Publishers, 1991

Françoise Héritier, Masculin/Féminin T. 2 - Dissoudre La Hiérarchie, Odile Jacob, 2002

Collectif, La place des femmes dans l'histoire, éditions Nouveau monde, 2019

Chloé Belard, « La notion de genre ou comment problématiser l'archéologie funéraire. », Les Nouvelles de l’Archéologie, 2015

Bonus : Quelques grandes dames de l’archéologie, aux vies passionnantes :
Kathleen Kenyon
Honor Frost
Gertrude Bell
Harriet Boyd-Hawes
 
Photo Célia Charkaoui-Sédille

Écrit par Célia Charkaoui-Sédille

Après un master en cinéma et des expériences sur des tournages, Célia s'est dirigée vers l'archéologie et l'histoire, afin de satisfaire sa curiosité pour les civilisations anciennes. Aujourd'hui assistante en conservation, elle interroge la place du féminisme, des luttes antiracistes et lgbtqi+ dans les sciences humaines. Avec la ferme conviction que la vulgarisation est un moyen de mettre le savoir à la portée de tous, elle cherche à offrir une vision plus intersectionnelle des disciplines historiques et archéologiques.

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